La prudence humaine, la prudence militaire

« L’homme vertueux, c’est celui qui librement pratique le bien[1] »

Et qu’est-ce alors que l’homme prudent ?

C’est l’homme qui :

  • discerne avec justesse le vrai bien à accomplir
  • choisit le(s) bon(s) (moralement et matériellement) moyen(s) pour le réaliser
  • gouverne l’action pour sa réalisation

C’est donc une vertu attachée au bien, réalisatrice, active, qui prend des risques mesurés par la raison. Et non pas une vertu frileuse, une vertu ‘parapluie’, la vertu des lâches. On a toujours tort d’opposer le courage et la prudence. Les vertus grandissent ensemble ou diminuent. En ce sens, cette citation de Lecomte de Lisle semble erronée :

« Quand la prudence est partout le courage n’est nulle part »

Et qu’a de particulier la prudence militaire ?

  • Elle est directement orientée vers un bien commun et non pas uniquement personnel. Elle suppose donc chez le militaire un plus grand sens du bien commun.
  • Elle exige une plus grande expérience que la prudence de la vie courante, notamment quand il s’agit des opérations de guerre. Car on n’a pas toujours le temps de discernement pour juger d’un engagement ou d’une réaction. L’expérience et l’entraînement personnelspallieront ce manque.
  • Elle suppose plus qu’ailleurs une réflexion préalable sur les grandes valeurs qui dirigent notre vie. Je veux parler des lignes blanches qu’on ne franchira jamais (torture, meurtre gratuit sans légitime défense, etc.). C’est bien-sûr le cas dans toute profession. Mais ici, la confrontation avec la mort, avec la guerre et ses horreurs, suppose plus qu’ailleurs des idées claires sur ce qu’on ne peut jamais faire.

En conclusion, je voudrais simplement inviter à regarder un film qui, selon moi, illustre au mieux cette vertu de prudence. Il s’agit de « Un Homme pour l’Eternité ». Grand film, parfaitement historique (jusque dans les textes), qui relate la vie de saint Thomas More, écartelé entre la fidélité à son roi (Henri VIII), comme chancelier d’Angleterre (Premier ministre), et sa fidélité à l’Église et au Saint-Père.

Ce film nous présente une figure de saint, ce qui, en ce temps de Carême, nous rappelle que la vertu est ordonnée à la perfection de la charité et non pas à une exemplarité stoïcienne. C’est l’amour le terme de toute vertu :

« Dans cette vie, la vertu consiste à aimer ce qui doit être aimé. Savoir le choisir, c’est de la prudence ; n’en être détourné par aucune peine, c’est de la force ; n’en être distrait par aucune séduction, c’est de la tempérance ; par aucun orgueil, c’est de la justice[2] ».

 

[1] Catéchisme de l’Eglise Catholique, n° 1804.

[2] Saint Augustin, Lettre 155.

 

Padré Henri Desjars, aumônier militaire